Aller au contenu

Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
99
LA LUXURE DE GRENADE

Celui-ci en profita pour interpeller le cavalier.

— Quelle est cette femme ? Comment se fait-il qu’elle soit avec vous ?

Et il ajouta avec autorité :

— Je suis le médecin de l’Émir.

Le soldat se troubla.

Maures et Espagnols vivaient en paix mais il était impossible d’empêcher d’un côté comme de l’autre des razzias de troupeaux, des incursions dans les villages où l’on enlevait les enfants et les femmes pour les vendre comme esclaves. Abul Hacen avait prescrit aux Alcaïdes des villes frontières de sévir contre les Maures pillards.

— Nous n’avons pas fait violence à cette femme. C’est une Espagnole, mais le chef ne compte pas la vendre comme esclave. Elle était cachée dans un bois près de Martos. C’est elle qui nous a appelés. Elle prétend être la fille de l’Alcaïde de cette ville. D’après elle son père l’aurait fait emmener de force de Séville, l’aurait fait fouetter et enfermer dans son château. L’histoire est-elle vraie ? On ne sait jamais avec les femmes ! En tout cas, elle nous a montré la trace du fouet sur ses reins.

Le soldat se mit à rire bestialement et sur un geste d’Almazan, il repartit dans la direction de ses compagnons.

Les montagnes lointaines se couvrirent d’une lueur sanglante. Sur la plus haute tour de l’Alhambra se découpa la silhouette d’un Maure dont la tête et les épaules étaient couvertes d’un camail étincelant qui enlevait à son contour le caractère humain et le rendait pareil à une sorte de génie du feu. Il sonna