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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/100

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LA LUXURE DE GRENADE

Le petit jour commençait à blanchir les terrasses. Almazan descendait seul les ruelles de l’Albaycin. Christian Rosenkreutz l’avait quitté soudain à un carrefour, avec un geste vague signifiant :

— Quand nous reverrons-nous, maintenant ?

Et il avait disparu, comme s’il s’était fondu dans le crépuscule qui précède l’aurore.

Almazan allait à petits pas, sans se presser. Il songeait que les portes de l’Alhambra s’ouvraient au lever du soleil et qu’ainsi il n’aurait pas à réveiller la garde marocaine.

Au moment où il allait atteindre le Darro il entendit un bruit de chevaux. Il s’arrêta. Quelques cavaliers débouchèrent d’une rue qui venait du côté de la porte d’Elvire. Il avait failli les heurter, mais il s’effaça sous un portail. Puis il passa la main sur son visage, croyant faire un rêve.

C’était Isabelle de Solis qu’il venait de voir, montée sur une mule blanche, au milieu de plusieurs soldats Maures. Celui qui paraissait le chef la tenait par les seins et riait d’un rire vulgaire. Almazan remarqua le dos un peu voûté de cet homme et sa barbe mal soignée. Isabelle de Solis riait aussi et elle regardait à droite et à gauche, avec une curiosité puérile, les maisons blanches de cette ville où elle pénétrait pour la première fois.

Le groupe était déjà loin sur les quais du Darro lorsque le cheval d’un soldat qui était resté en arrière et qui rejoignait ses compagnons se cabra devant Almazan.