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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/103

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VII

le marché aux esclaves

Il y avait longtemps qu’Abul Hacen pleurait sa jeunesse. Il ne s’habituait pas à vieillir. Vers sa cinquantième année, d’une façon subite et très rapide, comme par une malignité de la nature, ses cheveux s’étaient mis à blanchir. Il avait d’abord essayé de les teindre. Mais on lui avait parlé d’un certain Émir de Tlemcen qui était devenu aveugle par la pernicieuse influence de la couleur noire sur les nerfs optiques. Or, depuis son enfance, c’était une de ses faiblesses de craindre sans cesse de perdre la vue. Il redoutait également la poussière et la lumière des éclairs et il y avait toujours une petite lampe dans sa chambre, pour qu’il n’eut pas, en s’éveillant, la sensation d’être frappé de cécité. Il avait donc gardé sa chevelure blanche et il la sentait sur son crâne comme la force torturante du temps.

Mais il s’était mis à grossir. Son menton pendait, son ventre proéminait, il soufflait en marchant. Il ne se l’avouait pas à lui-même. Il sentait qu’il ne serait