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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/121

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LA LUXURE DE GRENADE

antique famille vivait dans une perpétuelle rivalité avec celle des Almoradis et depuis que le beau Tarfé avait été remarqué par Isabelle ils murmuraient contre elle et cherchaient une occasion de la perdre.

Grenade se divisa rapidement en deux camps, dont l’un prit parti pour Aïxa la Horra et l’autre pour Isabelle l’Espagnole. Et comme les Zegris avaient coutume de mettre les jours de fête un turban couleur de safran et que les Almoradis portaient un turban pourpre, chacun, selon son penchant, adopta une de ces couleurs, le peuple participa à cette querelle, les faubourgs furent rouges ou jaunes et des marchands juifs installèrent sur la place de Bibarrambla des boutiques où l’on ne vendait que des foulards de ces deux nuances.

Et tout à coup le destin mit brusquement face à face les deux femmes ennemies.

Dans la salle des ambassadeurs, Abul Hacen était allé recevoir l’envoyé extraordinaire du sultan d’Égypte. Après la réception, il devait l’amener dans la salle de la musique pour une conversation secrète à laquelle ne devaient participer que le Hagib et Daoud, l’Émir de la mer.

Alors, selon un cérémonial imité de celui des anciens Khalifes, les épouses de l’envoyé du sultan d’Égypte devaient être reçues à leur tour dans la salle des ambassadeurs par les épouses de l’Émir de Grenade. Il était donc prescrit à Isabelle et à Aïxa d’aller offrir des sorbets et des confitures de roses à une enfant de douze ans qui était l’unique épouse amenée par l’envoyé du sultan.

La lune venait de se lever, la salle des ambassa-