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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/120

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LA LUXURE DE GRENADE

était que l’illustre famille des Almoradis à laquelle appartenait Tarfé avait conçu de l’orgueil de ce que son imbécile enfant fût remarqué par la favorite. Quelle décadence dans les mœurs ! Où était le temps des vertueux Almohades qui avaient fait détruire les instruments de musique, défendu le port des métaux précieux et des broderies sur les vêtements, et qui punissaient de mort les femmes qui se montraient dévoilées ? Hélas ! Depuis Muhamad Alhamar les arts étaient redevenus florissants comme sous les Almoravides, on buvait du vin, les femmes se laissaient enlacer par les hommes en dansant la zambra, les enseignements du prophète n’étaient plus observés ! Abul Hacen, avec son désir sénile de plaisir, avait mis le comble à ces libertés.

Il disait vouloir revenir à la tradition des premiers Khalifes qui pratiquaient la tolérance et laissaient aux femmes une grande place dans l’État. Il voulait ressusciter le temps où Waladat, la Sapho de Cordoue, était admirée du monde entier, ou Maryem enseignait la grammaire et la poésie, ou Lobnah, dans sa chaire de Séville, commentait le Koran devant les doctes de tout l’Islam. Et sous ce prétexte il se vautrait dans les bras d’une créature plus vile que les chiennes. Ni les Imams, ni les Alfaquis n’osaient élever la voix contre lui. C’était à son fils Boabdil à rétablir une vertu qu’il baserait naturellement sur la vengeance.

Aïxa et son fils avaient trouvé des partisans chez les Zegris qui étaient des hommes rigides et religieux, puissants à Grenade par leur nombre et la grande quantité d’esclaves qu’ils possédaient. Leur