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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/178

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LA LUXURE DE GRENADE

L’adolescent qui se tenait près de la salle des roses avait entendu un grand cri de mort. Il avait aperçu un filet de sang sous le bronze de la porte. Il s’était enfui et on l’avait laissé passer, aucun ordre n’ayant été donné à son sujet. Maintenant haletant, tremblant, il racontait ce qu’il avait vu et entendu aux Almoradis et sa voix en fausset que l’émotion cassait encore avait quelque chose de ridicule et de tragique.

On délibéra pour savoir ce qu’il convenait de faire.

Mousa appuyé par Tarfé voulait qu’on allât chercher des armes et qu’on tentât l’assaut de l’Alhambra. D’autres, plus sensés, parlèrent de quitter la ville. Beaucoup d’Almoradis étaient morts. Comment grouper leurs serviteurs ? Quelles étaient les familles sur lesquelles on pouvait compter ? Ce fut la violence de Tarfé qui décida de la fuite de tous. N’était-ce pas son imprudence qui était la cause première du mal ? L’essentiel était de prévenir les Almoradis qui n’avaient pas encore répondu à l’appel de l’Émir. On aviserait le lendemain.

La lune se levait. Tarfé et Mousa se trouvèrent seuls. Ils partirent au galop dans les rues étroites de l’Albaycin et il n’y eut plus qu’un enfant de quinze ans, assis par terre, qui sanglotait le long d’un mur.

Et ce ne fut que tard dans la nuit qu’Abul Hacen sut enfin à quel point il était aimé d’Isabelle. Celle que l’on nommait la lumière de l’aurore pensa qu’il y allait de la vie et elle ne ménagea ni les paroles