Aller au contenu

Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/182

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
LA LUXURE DE GRENADE

Almazan reconnut Aboulfedia. Le médecin juif arrêta sa monture. Il ne montra pas de surprise de rencontrer son disciple mais ses petits yeux lancèrent un éclair de satisfaction.

— Tu le vois, dit-il, je fais mon entrée dans Grenade, sur un âne, comme Jésus-Christ dans Jérusalem ou comme le prophète Ibn Toumert dans Tlemcen. Mais ce prophète avait fait vœu de porter toujours une grossière chemise de laine tandis que moi, je te prie de le remarquer, je ne suis revêtu que de la plus rare soie.

Et il insista pour qu’Almazan palpât l’étoffe de sa chemise.

— Ce que je viens faire ? reprit-il, Lilith m’a appelé et me voici. J’ai amené Belial avec moi ainsi que tous les accessoires de la beauté et du plaisir.

Almazan vit que d’un de ses sacs sortait un grand brûle-parfums cassé et des coussins où les broderies alternaient avec les déchirures.

— Une jeune prêtresse me précède, chargée de fleurs.

Et il désignait Rébecca, qui, malgré sa lassitude, écarta les misérables fleurs qu’elle portait pour sourire avec une bouche édentée.

— Et maintenant, ajouta Aboulfedia, tu vas me conduire vers Lilith.

Almazan lui répondit que rien n’était plus facile que de l’introduire dans l’Alhambra à la condition qu’il continuât à donner chemin faisant à la favorite de l’Émir ce nom symbolique, son vrai nom étant trop impopulaire.

Il avait déjà saisi la bride de l’âne quand un cri