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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/190

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LA LUXURE DE GRENADE

bête était effacée, la matière avait reculé, la blancheur laiteuse de la peau avait triomphé du poil, grâce à la plus matérielle des créatures, par l’art de la grossière Fatima qui ressemblait à ces monstres de par delà les déserts d’Afrique, dont les voyageurs faisaient la description avec stupeur. En vérité, ce contraste devait être dû au Genni Al Dounia qui passait pour le plus fantaisiste des Gennis célestes.

Cette Fatima avait d’abord tâté le terrain légèrement, sans avoir l’air d’y toucher. Une allusion, une parole plaisante, rien de plus. Comme elle était prudente et sage sous l’enveloppe de l’hippopotame ! Ce n’est qu’un peu plus tard qu’il était venu à l’esprit de Khadidja comme une révélation que la masseuse Fatima pouvait avoir une mission supraterrestre. Elle ne réfléchit pas que Fatima était depuis très longtemps la confidente d’Aïxa et que c’était peut-être dans ses conversations avec cette fine mouche que Boabdil avait puisé, dès l’enfance, son amour éperdu de la trahison. Khadidja était tellement étrangère au mensonge qu’elle transformait en vérité les choses fausses qui l’atteignaient.

Almazan pensait à elle et il s’en était ouvert justement à cette bavarde, à cette colporteuse d’histoires, à cette joviale commère, à cette masseuse qui ne massait que pour parler et faire parler. Rien n’était plus vraisemblable ! On n’a pas le choix des messagers. Tout le monde ne pouvait avoir comme elle le pouvoir de communiquer sa pensée sans intermédiaire physique.

Les choses allèrent très vite, car, outre les commissions faites le jour par Fatima, il y avait celles plus