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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/196

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LA LUXURE DE GRENADE

Elle fut réveillée par une sensation curieuse. Une chose raboteuse et humide dont elle ne pouvait distinguer la nature, frottait sa main et son poignet. Puis cette indéfinissable chose la quitta et elle entendit une voix au-dessus d’elle qui disait :

— Elle finira bien par se réveiller.

C’était une voix singulièrement cassée et affaiblie, dont l’accent douloureux la frappa.

Khadidja, ne soulevant qu’à demi ses paupières, laissa filtrer un regard autour d’elle, à travers l’épaisseur de ses longs cils.

Elle était étendue tout de son long sur un tapis et sa première pensée distincte fut que ses voiles, en partie relevés, découvraient sa jambe au-dessus du genou. Elle allait les rabaisser vivement, mais le sentiment du danger la retint. Où était-elle ? Qu’est-ce qui la menaçait ?

D’autres voix cassées parlaient. Il y eut un bruit de verres, de langues qui claquent et des grognements de satisfaction et elle vit qu’il y avait là trois hommes qui la considéraient. Deux étaient assis parmi des coussins et le troisième, qui leur parlait en lui tournant le dos, était celui qui venait de se pencher sur elle et de lui prendre la main et le poignet.

Mais non, ce n’étaient pas des hommes. Elle était descendue, par un horrible enchantement, dans le séjour des mauvais Gennis. Elle voyait devant elle, Iblis, sous la triple apparence du Mal, de la Laideur et de la Nuit. Elle allait supporter le châtiment de ses fautes. Sa vie avait toujours été égoïste. Elle n’avait pas aimé assez les êtres qui l’entouraient, elle n’avait pensé qu’a la satisfaction de ses désirs phy-