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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/279

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LA LUXURE DE GRENADE

Il avait remarqué que de larges mahones plates sillonnaient sans cesse la mer autour des galères espagnoles, portant des troupes au rivage, rapportant de l’eau et des approvisionnements aux vaisseaux. Ces mahones avaient toutes à l’avant un falot rougeâtre. Or, il possédait une mahone de même forme. Dès que la nuit allait être venue, il allait s’y embarquer, il longerait d’abord la côte, puis, accrochant un falot rouge à son avant, il ramerait franchement vers la flotte espagnole. Il espérait, à la faveur de l’obscurité, être confondu avec les barques de ravitaillement et traverser la ligne ennemie. Ensuite, il déploierait sa voile et, si Allah le protégeait, il atteindrait Almuneçar ou même la côte marocaine.

Il offrait à Almazan et à Isabelle de les emmener. Celle-ci avait déjà accepté et un petit coffre qui contenait ses effets était déjà préparé, ainsi qu’un coffret où il y avait ses bijoux.

L’immuable soleil allait disparaître dans la mer et une brise de feu, roulant la poussière et les miasmes, se levait lourdement. Reduan déclara que cette brise permettrait de gagner l’Afrique dans la nuit. Il fut convenu qu’avant une heure, il serait au bas du jardin avec sa mahone.

Cette heure d’attente, sur la terrasse du jardin, passa très vite. Isabelle posait parfois sa tête sur l’épaule d’Almazan ou, le fixant de ses yeux d’or légèrement ambrés, elle lui demandait d’oublier les paroles mauvaises qu’elle lui avait dites. Est-ce qu’il n’était pas le seul homme qu’elle avait jamais aimé ?

Mais ses nerfs étaient ébranlés. Elle tremblait, elle