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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/305

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LA LUXURE DE GRENADE

droite, se tenait le dominicain chargé de l’assister et d’obtenir une confession tardive. Mais comme ce dominicain se rendait compte de la vanité de son effort, il proférait sans y penser, mécaniquement, ses invitations au repentir :

— Repentez-vous, mon frère, repentez-vous ! Confessez-vous à moi ! disait-il à demi-voix et comme s’il psalmodiait ces formules pour un pécheur absent.

Le bruit des chevaux, le murmure indistinct du peuple, les gémissements de quelques condamnés, les appels des Familiers chargés d’ordonner le cortège, le piétinement des confréries encombrant les rues voisines, le froissement des bannières et des armes faisaient une rumeur à la fois menaçante et triomphale. Mais Almazan sentait dans son âme une tranquillité si grande, qu’il lui semblait qu’aucune tempête ne pouvait la troubler.

Il vit passer les Charbonniers avec leurs longues piques, les Gardes attachés au Tribunal du Saint-Office, noirs de la tête aux pieds, avec des gardes d’épées et des étriers noirs, la confrérie de Saint-Pierre-Martyr portant une croix blanche, les Dominicains portant une croix noire, le Procureur fiscal précédé d’une croix rouge, les Frères de la Miséricorde, ceux de la Très Sainte Trinité, les moines mendiants, les Carmes, les Bénédictins, les Franciscains, les Augustins récollets, les Grands d’Espagne, les fonctionnaires de l’Inquisition et ceux qui étaient venus sans droit, avec un vêtement sombre et un grand cierge, poussés par l’orgueil de figurer comme processionnaires dans ce cortège de la mort.

Les condamnés n’étaient qu’au nombre d’une