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Page:Magre - La Luxure de Grenade, 1926.djvu/75

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LA LUXURE DE GRENADE

couleurs, les parfums et certaines pierres et il lui était indispensable de composer une teinte exactement semblable à celle de ses émeraudes. Ses expériences ne furent pas toujours heureuses. Elle s’en alla une fois le long du Darro, montée sur un splendide cheval donné par Abul Hacen, entièrement peint en un vert qui devait être assorti à ses yeux et à ses bijoux.

Le roi de Grenade lui cacha l’immense gaîté que son passage avait provoquée parmi les habitants de l’Albaycin, ne sachant pas si cette créature délicate n’en mourrait pas de honte ou si, au contraire, cela ne l’inciterait pas à faire peindre tous les chevaux de ses écuries.

D’ailleurs il préférait la voir le moins possible. Il évitait ainsi la tyrannie de ses caprices auxquels il ne savait pas résister.

Khadidja marchait, le visage dévoilé, à l’imitation de la célèbre poétesse de Cordoue, Ouallada.

Elle disait que puisque le khalife Ommeyade Al Mostakfi avait permis à sa fille de ne pas porter de voile sur son visage au temps de la plus grande splendeur du khalifat, on pouvait bien le lui permettre. À l’inverse de Ouallada, Khadidja était chaste et voulait le demeurer. Elle glorifiait pourtant l’amour et elle laissait parfois entendre que si elle ne s’y adonnait pas, c’était à cause d’un secret qu’elle ne révélerait jamais.

L’Émir Daoud cachait sa timidité sous la superbe de ses attitudes magnifiques. Il ne parlait de son amour que par allusions, mais ces allusions étaient