Page:Magre - La Tendre Camarade, 1918.djvu/145

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Plus haut pourtant que les lataniers et les caoutchoucs se fit entendre ma voix de chaque soir pour l’âme enfantine de Thi-Nam. Elle lut les livres qui m’étaient chers et que j’avais emportés, elle renonça sans s’en douter à mille détails des modes annamites, elle devint semblable à une petite Française par le langage et par la manière d’aimer.

Elle disait m’aimer et je ne le croyais pas. Je n’avais jamais été aimé en France, à cause de ma timidité, de mon manque de fortune, de mon physique médiocre. La seule apparence de son amour me donnait une illusion qui devenait chaque jour plus douce. Je m’habituai à ce bonheur dont je doutais. Mon scepticisme diminua. Je m’exagérai le prestige moral que j’avais conquis sur Thi-Nam et l’importance de mon rôle.