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LA BOURDONNAIS ET DUPLEIX

pides et allèrent droit au but. MM. D’Espresménil, Barthélémy et Bruyères, procureur-général, se transportèrent chez M. de La Bourdonnais, pour le « sommer de la part du Roi de choisir l’un des deux partis qui lui sont présentés par notre lettre du 26 du courant, les seuls que le conseil juge faisables et convenables aux circonstances présentes, à la gloire du Roi, à l’honneur de la nation, aux intérêts de la Compagnie, à la force de son escadre, secondée des secours d’ici, et à la faiblesse de nos ennemis par terre et par mer ; et faute par lui de choisir celui du choix duquel on le laisse le maître, de répondre en son propre et privé nom de tout ce qui pourra arriver par la suite et des dépenses immenses que son projet sur Madraz, depuis si longtemps médité, et conduit au point de l’exécution a occasionnées à la Compagnie. »

« Et si la maladie l’empêche d’agir lui-même, comme il n’y a point de temps à perdre, et que les moments sont précieux, le Conseil juge M. de la Porte-Barré, dont la capacité et la prudence sont connues, très-capable d’exécuter celui des partis qu’il choisira. »

La réplique de La Bourdonnais fut courte : « J’ai reçu, écrivait-il, la citation et son contenu. Je n’ai consulté le Conseil de Pondichéry que sur l’affaire de Madraz ; il n’avait à donner que son avis, pour ou contre. Quant à la destination de mon escadre, il n’a aucun droit de s’en mêler. Je sais ce que je dois faire et mes ordres sont donnés pour qu’elle quitte Pondichéry ce soir[1]. » En conséquence, la flotte fit voile sous les ordres de M. de la Porte-Barré[2], La Bourdonnais demeurant seul en arrière, à cause de son état de maladie. L’escadre, croisant le long de la côte, réussit à capturer deux petits navires dans les parages de Madras. Elle revint ensuite

  1. À Messieurs du Conseil supérieur de Pondichéry, le 27 août 1746.
  2. M. Mill affirme que Dupleix poussa les mauvais procédés jusqu’à ordonner à La Bourdonnais de remettre à terre les troupes de Pondichéry. Il est très-vrai que le 27, en apprenant par la réponse de La Bourdonnais que la flotte allait partir, mais ignorant pour quelle destination et dans quel but elle allait être employée, Dupleix ordonna le débarquement de deux cent cinquante soldats et de cent topas avec leurs offciers, dans les termes suivants : « La distance à laquelle notre escadre peut se trouver, par suite des événements que Dieu seul peut prévoir, et ces troupes étant inutiles dans vos vaisseaux, je vous prie de débarquer les troupes ci-dessus mentionnées, afin que je sois en état de répondre au Roi, de la place qu’il a confiée à mes soins, etc. » Il n’est pas moins vrai aussi que, recevant à la même date la réponse de La Bourdonnais, que la destination de son escadre était de balayer les routes de Madras et qu’elle ne serait pas absente plus de huit ou dix jours, il ne retira de l’escadre que cent vingt-cinq Européens et cinquante Cipayes utiles pour la défense de Pondichéry.