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REFUS DU CONSEIL

vous avez fait pour la prise de Madras et nous pourrons nous relever, même soutenir nos avantages. »

On se demande si, dans de telles circonstances et même avec la perspective de grands avantages, le Gouverneur de Pondichéry devait se croire obligé à courir de si grands dangers ? Toujours est-il qu’après l’expérience des quatre derniers mois, Dupleix ne se sentait pas disposé à permettre que la sécurité de la colonie dépendit des caprices d’un homme qui jusqu’alors n’avait cessé de traverser et d’entraver ses projets les mieux conçus et les mieux mûris. Considérant que l’escadre du commodore Peyton n’était pas encore détruite, il sentait qu’il était absolument nécessaire, pour la sécurité de Pondichéry, que la flotte séjournât dans des parages sûrs, d’où on pût la rappeler en cas d’urgence. Dans son opinion et celle du Conseil, Achem était le lieu qui présentait les garanties désirables. En conséquence, malgré le ton conciliant dans lequel étaient conçues les lettres par lesquelles La Bourdonnais lui faisait ses propositions, quoiqu’il sollicitât Dupleix de tirer un rideau sur le passé et de donner comme pour l’expédition de Madras toutes les ressources de Pondichéry, il se sentait contraint de refuser son concours. Le fait est qu’il ne pouvait tirer le rideau. Il ne pouvait oublier les terribles épreuves des six dernières semaines, le défi porté ouvertement à son autorité, l’arrestation de ses agents, l’envoi du contingent de Pondichéry à bord de l’escadre, l’usurpation de pouvoir appuyée uniquement sur la force matérielle. En tous temps, de pareils actes eussent été véritablement difficiles à oublier ; remettre volontairement la colonie à la merci de celui qui n’avait montré aucun respect pour l’autorité de son Gouverneur, eût été le comble de la folie ! Les phrases mielleuses de La Bourdonnais s’adressaient donc à un personnage qui n’avait plus aucune confiance ni en elles, ni en leur auteur. Le Conseil supérieur refusa de donner suite à ce plan, du moins pour le présent. La Bourdonnais n’avait pas voulu descendre à terre ; le Conseil déclina son invitation de se rendre à bord pour y discuter les affaires. Aucun des deux partis ne voulait se fier à l’autre. Dans cette situation, on ne doit pas s’étonner si en répondant aux propositions de La Bourdonnais, on se borna à réitérer purement et simple-