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PARADIS GOUVERNEUR DE MADRAS

conquête, comme le prix légitime de la valeur française, et il résolut d’employer, pour le bien de la France, le pouvoir dont il disposait maintenant, sans tenir compte des engagements par lesquels La Bourdonnais s’était lié.

Aussitôt qu’il eut reçu avis de la défaite du nabab et de la victorieuse délivrance de Madras, il nomma Paradis Gouverneur militaire de cette place, en remplacement de D’Esprémesnil, qui, par sa position civile, n’aurait pu, pensait-il, exercer une autorité suffisante sur les troupes. Le nouveau Gouverneur fut chargé de publier une proclamation déclarant Madras ville française par droit de conquête, et déclarant nuls et non avenus tous les engagements pris par La Bourdonnais, qu’il désavouait.

Paradis exécuta ces ordres sans perdre de temps. Il avait battu Tarmée du nabab le 4 novembre et était entré à Madras le même jour ; le 9, il avait reçu ses instructions, le 10, la proclamation fut publiée. Elle annulait le traité de rachat conclu par La Bourdonnais, déclarait propriété française les marchandises, vivres, munitions et chevaux, et ordonnait à tous les résidents anglais qui ne voudraient pas prêter serment d’allégeance aux Français, de quitter la ville dans le délai de quatre jours. De plus, il était permis aux Anglais de disposer de leurs meubles, vêtements et bijoux ; ils étaient simplement requis de ne pas servir contre la France, jusqu’à ce qu’ils eussent été échangés. Le Gouverneur Morse et les autres officiers furent conduits prisonniers à Pondichéry, où ils furent traités avec beaucoup de courtoisie et d’égards[1]. Les Anglais protestèrent en masse contre la conduite hardie de Paradis, et quelques-uns d’entre eux se réfugièrent au fort Saint-David. Parmi eux se trouvait un jeune écrivain nommé Robert Clive, qui deviendra plus tard l’un des héros de notre histoire.

Le fort Saint-David, situé à environ douze milles au Sud de Pondichéry et à deux milles au Nord de Cuddalore, avait été acheté par les Anglais, en 1691, et petit à petit très-bien fortifié. Sa force

  1. M. Orme affirme que les prisonniers anglais furent conduits avec ostentation dans les rues de Pondichéry ; mais il ne cite aucune autorité à l’appui de son dire. Le fait est que les prisonniers furent traités avec la plus grande considération, et que l’histoire de la procession fut plus tard inventée par La Bourdonnais, qui avait quitté Pondichéry longtemps avant l’arrivée des prisonniers.