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PREMIÈRE LUTTE DANS LE CARNATE

tion projetée paraissait donc avoir bien plus de chances de succès que celle de La Bourdonnais contre Madras. Mais personne ne savait mieux que Dupleix qu’en dépit de toutes les apparences favorables, le plus indispensable élément de succès lui faisait défaut. Il avait bien les soldats, les canons, les munitions de guerre ; mais où était le général ? S’il n’avait un homme capable d’en remplir les fonctions, il échouerait évidemment à la veille de réussir. li en avait la conviction, et il s’occupa avec son énergie accoutumée de remplir ce vide.

Le commandant en chef des troupes françaises était à cette époque le général de Bury. Cet officier était âgé, et avait les infirmités qui accompagnent les années. Confier l’expédition à un homme placé dans ces conditions, c’était courir à un désastre certain, et cependant, par son âge même il avait droit, au commandement. À côté se trouvait Paradis, le héros de Saint-Thomé, ingénieur de profession, dont le courage et la capacité étaient prouvés par la passé. Dirigée par lui, l’entreprise aurait réuni toutes les conditions favorables ; aussi tous les efforts de Dupleix eurent-ils pour but de lui en assurer le commandement.

Mais pour le malheur de la France et pour le sien propre, Dupleix ne réussit pas. Entre de Bury et Paradis, il y avait d’autres officiers qui protestaient contre un semblable passe-droit. L’origine suisse de Paradis, son grade inférieur, la jalousie que sa récente victoire avait causée, tout se réunit pour s’opposer à son élévation, et en présence de la vive opposition que rencontra Dupleix, il dut renoncer à ce choix.

Ce fut donc sous le commandement de de Bury que les forces françaises se mirent en marche, dans la soirée du 19 décembre. Le matin suivant, elles traversèrent la rivière Pounar presque sans opposition, et s’emparèrent d’un jardin entouré de murs, à un mille et demi Nord-Ouest du fort Saint-David. Après une longue marche, les troupes cédant à la fatigue et à la faim, se croyant d’ailleurs en pleine sécurité, déposèrent leurs armes et se mirent à préparer leur repas.

Qu’avaient fait les Anglais depuis que nous les avons quittés ? Irrités par les procédés de Dupleix à Madras, et par l’annulation