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LES FRANÇAIS SONT REPOUSSÉS

coup d’ordre vers la ville, croyant ne rencontrer qu’une faible résistance. Leurs échelles étaient à peine dressées contre les remparîs, qu’une décharge de mitraille et de mousqueterie sema la confusion et la mort dans leurs rangs. Frappés d’étonnement et de terreur, ils se retirèrent en désordre et, sans presque faire de halte, arrivèrent à Pondichéry, déconcertés et humiliés[1].

Dupleix vit encore une fois échouer ses projets sur le dernier refuge des Anglais ; mais cette fois ce n’était certes pas par sa faute, Si un général expérimenté et entreprenant eût été à la tête du détachement français, il aurait assurément donné lieu au major Lawrence de regretter sa finesse. Si les Français, au lieu d’attendre la nuit, avaient attaqué la ville aussitôt qu’ils virent ses remparts dégarnis et sa garnison s’éloigner, toutes les chances leur étaient favorables. C’eût été au major Lawrence d’être surpris, et le stratagème eût tourné contre son auteur. Mais, pour cela, il aurait fallu une tête pour concevoir, une volonté pour exécuter sans retard, et ces deux éléments manquaient dans le commandement des troupes françaises. Une insouciante confiance existait là où auraient dû régner l’énergie et la vigilance ; et une action qui aurait pu être fatale aux Anglais devint au contraire la cause d’une terrible défaite pour les Français, et, par suite de l’indolence de leur chef, menaça leur colonie d’une destruction presque inévitable ; car en ordonnant cette dernière attaque, Dupleix avait des vues bien autres que dans ses précédentes tentatives. Jadis, il luttait pour obtenir la prépondérance dans l’Inde, il voulait chasser les Anglais de cette côte ; mais, depuis que l’attaque du 14 mars avait été déjouée par l’arrivée de la flotte anglaise, l’aspect des affaires avait bien changé. Non-seulement l’amiral Griffm, en restant sur la côte, empêchait tout trafic français et interceptait toute communication avec la France ; non-seulement Bouvet n’avait paru devant Madras que pour y débarquer des renforts et retourner aussitôt aux îles, mais Dupleix avait appris que les Anglais avaient équipé une flotte et une armée également formidables, plus nombreuses que toutes celles qui avaient jusqu’ici paru dans les mers de l’Inde, et cela, dans le but d’assiéger

  1. Il ne nous a pas été possible de nous assurer du nom de l’officier qui commandait les troupes françaises dans cette affaire.