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LAWRENCE MARCHE SUR TRICHINOPOLY

cents Cipayes, avec huit pièces de campagne et tous les approvisionnements nécessaires, partit pour Trichinopoly ; Lawrence en était bien le commandant, mais Clive était son bras droit.

Il est temps de revenir à Dupleix. C’était lui qui, au moment où il apprit que Clive était allé au fort Saint-David pour préparer la délivrance de Trichinopoly, jugeant qu’il n’y avait pas de honte à apprendre quelque chose même d’un ennemi, avait poussé Rajah-Sahib à faire, dans les territoires anglais, la diversion dont nous avons rapporté les résultats. Quoiqu’elle n’eût pas eu de succès, on ne peut nier qu’elle méritât de réussir et qu’elle en était bien près lorsque, au moment de remporter la victoire, le commandant français avait, par sa négligence, permis qu’elle lui échappât. Dupleix fut profondément affecté de cette défaite, qui renversait tous ses plans : non-seulement elle le privait de soldats dont il ne pouvait guère se passer et d’une artillerie de campagne qui était sans prix, mais encore elle avait abattu les esprits de ses alliés indigènes d’une façon fort dangereuse et qui n’avait pas encore eu d’exemple. Les indigènes désertaient en masse le drapeau français pour se ranger sous l’étendard de l’Angleterre. Plus d’un satrape puissant avait retiré son adhésion à Chunda-Sahib, et prêté serment de fidélité à Mahomed-Ali assiégé. Telles étaient les conséquences de la victoire de Clive, des défaites répétées des Français, et surtout du désastre de Covrebank. Voir abandonner avec une pareille négligence les avantages qu’on était au moment de s’assurer, c’en était trop, même pour une nature aussi ferme que celle de Dupleix. Ceux de ses officiers qu’il aurait pu rendre responsables de ces revers étaient ou prisonniers, ou tués. Le poids de sa colère tomba donc sur Rajah-Sahib, dont la pusillanimité et l’incapacité avaient été évidentes. Il refusa pendant plusieurs jours de le voir, et quand enfin une entrevue eut lieu, il ne put, malgré l’habitude qu’il avait des rapports avec les princes indigènes, déguiser le mépris qu’il ressentait.

Mais, quoique profondément mortifié par le mauvais succès de plans si bien conçus, Dupleix restait fidèle à cette politique hardie et audacieuse qu’il regardait avec raison comme plus nécessaire que jamais. Ce qui avait été perdu dans le Nord du Carnate pouvait