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CHUTE DE DUPLEIX

Cette grande victoire, due à l’audace et au courage du commandant anglais, fut décisive. Onze pièces de canon, cent onze prisonniers au nombre desquels étaient Astruc et dix officiers, deux cents tués ou blessés, en attestèrent l’importance. Les Anglais ne perdirent que quarante des leurs. L’influence de ce succès sur la situation de Trichinopoly ne fut pas moins favorable aux Anglais : Cette ville se trouva délivrée des horreurs de la famine, car, tandis que la plus grande partie des Français se réfugiait dans l’île de Seringham, le major Lawrence, balayant leurs détachements au Sud du Cauvéri, fit abonder les vivres dans la ville, puis se dirigea avec le gros de ses troupes vers Coiladdy, sur la rive Nord du Cauvéri, dans le territoire de Tanjore. Mais laissons pour quelque temps les parties belligérantes dans leurs situations respectives : les Français vaincus et humiliés, n’ayant confiance ni en eux-mêmes ni en leurs officiers ; les Anglais fiers de leurs succès, confiants dans leur général, qui les avait trois fois conduits à la victoire, et assurés de l’avenir.

Nous les quittons pour retourner auprès du Gouverneur, dont les grands projets avaient été si étrangement déjoués.

Pendant que se passaient devant Trichinopoly les événements que nous venons de raconter, Dupleix, tout en continuant à nourrir et à renforcer ses armées, avait fait tous les efforts imaginables pour rétablir la paix dans le Carnate. Il avait plusieurs raisons pour agir ainsi. Les Directeurs de la Compagnie des Indes et les ministres n’avaient jamais cessé d’en faire ressortir la nécessité. La guerre prolongée dont il avait tant espéré, vidait la caisse des actionnaires, résultat peu propre à satisfaire ceux qui recherchaient avant tout des dividendes. La lutte que Dupleix avait tant et tant de fois déclaré ne pouvoir durer longtemps, et qui, suivant lui, devait procurer à la France une gloire sans précédent, semblait aux Directeurs destinée à durer indéfiniment et à n’avoir pour terme que l’humiliation et non la grandeur de leur pays. Le succès des plans de Dupleix, qui devait être immédiat, tardant trop à se réaliser, il en résulta ce qu’on devait naturellement attendre. Ceux des Directeurs qui depuis longtemps étaient jaloux de ses succès, se joignirent à la faction qui était réellement alarmée.