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CONCLUSION

Contade[1]. Pour entretenir ces armées si coûteuses qui n’étaient pas même en état de tenir tête à un lieutenant du roi de Prusse, et leurs états-majors encore plus ruineux, on abandonnait l’Inde, sans lui donner l’argent indispensable à une campagne, sans renforts et même sans quelques vaisseaux qui auraient pu suffire pour la sauver. À quelque point de vue que les Français d’aujourd’hui puissent déplorer la corruption qui avait gagné tous les fonctionnaires de Pondichéry, le manque d’unanimité du Conseil et les intrigues des conseillers ; quelque condamnation qu’ils puissent porter contre l’absence de dévouement patriotique qui amena sa chute, ils devront toujours faire peser le blâme le plus sévère sur le Gouvernement français et sur le monarque sensuel sous l’autorité duquel les ressources du royaume étaient dissipées avec tant de prodigalité. Tandis que l’Inde anglaise recevait d’abondants renforts d’hommes et de vaisseaux et ne se trouvait pas encore bien traitée parce que, dans le cours de la dernière année, elle n’avait pas reçu son subside annuel en espèces, l’Inde française, depuis l’arrivée des troupes de Lally, n’avait guère reçu que deux millions de francs de la mère-patrie ! Il ne pouvait y avoir qu’un résultat à ce mode de soutenir une colonie, et il se produisit le 16 janvier 1761.

Nous n’hésitons pas à assigner cette date à l’échec final qu’éprouvèrent les efforts de la France tendant à créer un empire dans l’Inde, parce que, jusqu’au moment de la capitulation de Pondichéry, il était toujours possible d’en différer la chute, et les Français conservaient des chances de regagner leur supériorité. Jusqu’au premier janvier 1761, l’action énergique de conseils bien unis, aurait encore pu anéantir l’armée assiégeante. D’Aché, arrivant le 6, eût forcé la levée du siège et peut-être consommé la destruction de la flotte anglaise. Mais les événements du 16 janvier rendirent à jamais impossible la suprématie française dans le Carnate. Il est vrai que la paix de Paris, signée en 1763, rendit à la France Pondichéry et les autres possessions dans le Sud, mais elles étaient démantelées et sans défenses ; leur commerce était à peu près ruiné ; leur influence détruite ; la défaite et la ruine avaient laissé leur empreinte

  1. Le lecteur trouvera dans le Frédéric-le-Grand de Carlyle, tous les renseignements désirables sur le personnel dont étaient suivies les armées de Soubise et de Richelieu.