de moins de quarante francs[1]. La nouvelle combinaison de Law, interdisant la vente des actions nouvelles àceuxqui n’en possédaient pas un nombre quadruple de la première émission, eut pour conséquence une recherche extraordinaire de celles-ci qui atteignirent bientôt un cours très-élevé. Les détenteurs primitifs et ceux qui, comme Law et ses amis, avaient acheté avant la fusion, réalisèrent ainsi de grands bénéfices. Les Parisiens, avec leur heureux esprit d’à-propos, donnèrent aux anciennes actions le nom de mères et aux nouvelles celui de filles, indiquant que celles-ci apportaient toujours leur dot avec elles, car telle était la fièvre de spéculation, croissant d’heure en heure, qu’un acheteur pouvait immédiatement réaliser le double ou le triple de ce qu’il avait déboursé[2].
Les actions de la Compagnie des Indes reçurent bientôt une nouvelle impulsion. Les bénéfices de la monnaie lui avaient été cédés pour une durée de neuf années contre le payement au roi de cinquante millions à époques fixes pendant un espace de quinze mois. Pour réaliser cette somme, il fallait une nouvelle émission d’actions ; la Compagnie fut autorisée à en émettre cinquante mille au taux de cinq cents francs ; mais à cette époque, les premières actions, les filles, étaient montées de cinq cent cinquante francs au chififre énorme de mille francs l’une, c’est-à-dire presque de cent pour cent. Afin de tirer parti de cette hausse, la Compagnie décida que les cinquante mille actions nouvelles seraient émises au taux nominal de cinq cents francs, mais qu’elles ne seraient livrées qu’au cours des anciennes, soit mille francs. Outre cela, et dans le but d’augmenter encore la valeur des anciennes actions, Law fit décréter que, pour en obtenir de nouvelles à ce cours exorbitant, il faudrait prouver la possession d’une valeur quintuple en titres anciens, et les payer non en espèces, mais en billets de la Banque du roi. Les actions de la dernière émission reçurent le nom de petites-filles : le désir d’en obtenir faisait non-seulement hausser les actions mères, mais encore rendait chacun empressé
- ↑ En supposant que les billets fussent en perte de soixante-dix pour cent, la valeur de cent vingt-cinq francs pouvait être achetée par vingt-sept francs cinquante centimes en numéraire. Or cent vingt-cinq francs représentaient le premier appel fait aux actionnaires de la Compagnie Occidentale.
- ↑ Law, son système et son époque.
