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Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/116

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XVI

— Ma petite fille…

— J’y vais !

Laurence saute du lit, enfile son peignoir et se précipite, comme si elle venait d’entendre le cri nocturne par lequel la malade l’appelait d’une chambre à l’autre :

— Ma petite fille…

— J’y vais ! répondait Laurence.

Et vite, elle accourait. Qu’était-ce : la piqûre de morphine ? À boire ? La potion calmante ?

Hélas ! Réveillée, Laurence reprend conscience : ce cri, c’est dans son rêve qu’elle l’a perçu. Jamais plus Mme d’Hersac ne pourra dire :

— Ma petite fille…

Et Laurence se souvient : hier soir, elle a voulu veiller sa mère. Bessie et François s’y sont opposés, la forçant à se coucher, lui promettant qu’ils allaient veiller tous deux, mais certifiant qu’elle avait besoin de repos. Etait-ce donc vrai, puisqu’elle s’est endormie malgré tout ?

— Quelle heure est-il ? Cinq heures du matin.

Elle écoute : nul bruit dans la maison. Avec une légèreté et une sûreté de somnambule, elle glisse doucement hors de sa chambre, entre dans celle de sa mère.

Assis chacun dans un fauteuil, François et Bessie se sont assoupis en face l’un de l’autre. La morte, plus loin, se distingue dans un jeu d’ombre et de lumière, la flamme tremblotante des cierges dansant sur son visage blafard.