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Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/138

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recula, interdite : armée d’un plumeau et d’un balai, la vieille Maria, revenue, nettoyait consciencieusement la pièce.

— Comment ?… Que signifie ?… Par où êtes-vous entrée ? questionna Mlle d’Hersac, stupéfaite.

Maria s’approcha et répondit avec une déférence un peu malicieuse :

— Voilà… Depuis que j’ai quitté mademoiselle, je ne me suis pas replacée : ça m’aurait semblé drôle, de faire partie d’une autre maison… quand on resté vingt ans dans la même ! Alors, je me suis mise femme de ménage… je travaille une heure chez l’un, deux heures chez l’autre… Et comme mademoiselle a oublié de me redemander la clé de l’escalier de service, j’en profite pour venir ranger un peu ici, quand j’ai un moment… mademoiselle n’est pas faite pour ces ouvrages-là.

Cet intérêt d’inférieure qui persistait à se témoigner, naïf, malhabile et d’autant plus touchant, eut raison du calme factice que s’imposait Laurence.

Attendrie et humiliée tout à la fois, la jeune fille se laissa tomber sur une chaise et fondit en larmes.

Bessie adressa un signe de tête à Maria qui sortit silencieusement, toute décontenancée.

Miss Arnott s’assit auprès de Mlle d’Hersac et s’efforça de l’apaiser. Laurence balbutia à travers ses sanglots :

— Je vous demande pardon… ne faites pas attention : c’est nerveux… Voyez-vous, en ce moment, il ne faut pas que je sois émue… cela me rappelle immédiatement ma triste situation. J’ai les nerfs si ébranlés…