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Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/4

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vélaient le labeur acharné de l’homme de science.

Bessie coula vers son fiancé le regard approbateur d’une femme satisfaite de son choix ; puis elle déclara, sans répondre directement à Miss Turner :

— L’intervention de notre pays dans une guerre de justice et de liberté a de quoi nous rendre fiers de nous-mêmes… Mais, à côté de la grande question patriotique, sur laquelle tout a été dit, il est une petite question qui a son importance…

Et la jeune fille poursuivit, d’un ton dogmatique :

— Retournons les rôles. Si c’étaient les États-Unis qui fussent engagés depuis trois ans dans une guerre périlleuse et qu’une armée française traversât les mers pour venir à leur aide, que dirions-nous…

— Nous dirions que c’est arrivé déjà, en 1776, fit doucement le docteur Warton.

Bessie continua, sans relever l’interruption :

— Quel accueil les Américains, et surtout les Américaines, réserveraient-ils à ces Français venus d’outre-Atlantique ?

— Mais un accueil enthousiaste, je suppose ! s’exclama Dora Leslie, une blonde capiteuse à la carnation éblouissante.

Bessie conclut, très sérieuse :

— Eh bien, ma chère, pensez-vous que les Françaises ne se préparent pas à recevoir avec un égal enthousiasme nos soldats américains ?

— Mais je l’espère bien ! s’écria Teddy Arnott qui entrait à cet instant.

Le jeune Arnott offrait avec sa sœur cette ressemblance qui caractérise les enfants jumeaux. Ce charmant blondin aux yeux limpides, dont les vingt et un ans dissimulaient leur solide musculature sous des formes d’éphèbe, était mince, alerte et souple comme une femme.