Aller au contenu

Page:Marais - La Nièce de l'oncle Sam (Les Annales politiques et littéraires, en feuilleton, 4 août au 6 octobre), 1918.djvu/5

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il avait, de Bessie, le teint clair, le regard malicieux ; et son visage imberbe conservait la fraîcheur de l’enfance. Il adorait sa sœur et se pliait à tous ses caprices.

Il s’écria en riant :

— Je l’espère bien que les séduisantes Françaises nous réservent bonne hospitalité. Je viens de voir notre oncle, le colonel Blakeney, et il m’a promis que je ferai partie, sous ses ordres, du premier contingent envoyé en France…

Les visiteurs félicitèrent le jeune homme avec cette expansion et cette exubérance provoquées par la fièvre d’ardeur patriotique qui exaltait New-York depuis ces dernières semaines.

Le premier mouvement passé, Teddy, se tournant vers sa sœur, interrogea :

— Et pourquoi Bessie est-elle mécontente ?

— Elle prétend que cette guerre est un danger pour la jeune fille américaine, riposta Annie Turner.

Bessie expliqua, avec sa même gravité comique :

— L’idée du départ proche, des périls courus, de l’éloignement pour un long temps, décident des engagements entre jeunes gens et précipitent les fiançailles. Parmi tous ces hommes qui partent, quel est celui qui ne laisse rien derrière lui ?… Puis, ils arrivent dans un pays où toutes les flatteries, toutes les tentations leur sont offertes. Quelle que soit leur honnêteté, ne seront-ils pas excités par un désir d’infidélité plus ou moins passagère ? Et la fiancée restée en Amérique comptera-t-elle beaucoup, lorsqu’elle n’aura que son souvenir pour la défendre contre la rivale française ?

Et Bessie ajouta avec conviction :

— La Française est si fascinante, si