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Page:Marais - La Virginite de Mademoiselle Thulette.djvu/124

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Elle la ramassa d’un revers de raquette, pliant son corps mince avec une souplesse de chatte. Dépitée, mais franche avec elle-même, Fanny Thulette dut s’avouer que les grâces blondes de Thérèse s’appariaient fort bien, trop bien, aux séductions d’Edvard. Et elle gronda douloureusement :

— Non, non, cette gamine ne me le reprendra pas ! À son âge, elle a tout le temps d’en retrouver un autre.

Nerveuse, elle se piqua la tête en épinglant son chapeau.

— Je ne puis compter que sur moi-même, murmura-t-elle. « Im ènn ani li… ». Le souvenir l’obsédait d’un petit juif, roumain ou russe (elle ne savait plus bien) qui, se prétendant lésé, répétait à M. Thulette avec un humble entêtement :

— Im ènn ani li, mi li ? Si je ne me défends pas, qui me défendra ?

Quatre à quatre, elle descendit l’escalier célèbre du Thulette qui, entre deux rampes dorées sans discrétion, étage plus de marches de marbre rose que Musset n’en mit jamais dans ses vers.