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Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/108

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Moi aussi, j’étais une petite fille isolée moralement, livrée d’avance au premier qui jouerait avec son amour ; destinée à l’affreuse déception dont celle-ci souffre aujourd’hui… Moi aussi, j’étais toute seule et je n’avais pas de maman…

Et soudain, cédant à une impulsion irraisonnée, je saisis brusquement la jolie tête brune à deux mains, plongeant mes doigts dans la masse soyeuse des cheveux crespelés, et j’embrasse la jeune fille d’un élan violent, sur ses fines paupières qui se ferment sous ma bouche…

Lorsque je m’écarte, un peu confuse de cette effusion si contraire à ma nature, Sylvie me contemple avec ahurissement, mais sans paraître offensée : effarée, non effarouchée. Je murmure :

— Pardonnez-moi, mademoiselle… Vous ne devez pas comprendre. Vous ne connaissez rien de moi, sinon la façade : et la façade, c’est mon hôtel, mon ami, ma renommée tapageuse… Vous ignorez la vraie Nicole. Or, sans vous en douter, vous m’avez touchée, extrêmement… tout à l’heure. Il m’a semblé que vous racontiez mon histoire : si les femmes se montrent