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Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/123

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marche de Souza sent le chypre, le muguet nouveau et l’alcool aromatisé des cocktails…

Mais, je m’interromps, tout à coup. Derrière Paul, à la table voisine, viennent de s’asseoir trois personnes. Un grand monsieur grisonnant, au long visage chevalin, avec cette mine éternellement ennuyée des gens qui suivent leur vie comme un enterrement. Une femme rousse, rogue, guindée, calant une taille massive sur deux hanches rebondies. Et, cachant sa figure mignonne sous un immense chapeau de paille foncée… Sylvie… Oui, Sylvie. Rencontre. Je n’ose pas dire : télépathie… Je les regarde curieusement : c’est son père, ce vieux monsieur qui a la physionomie hilare d’un spectateur, à la représentation d’un drame scandinave ; et cette forte rousse au petit feutre tyrolien vert et jaune, à la poitrine importante, est la fameuse Fraülein… Je reconstitue, sans peine, le programme de leur journée : c’est la fête de Sylvie, ou quelque autre anniversaire. Le père a sorti la jeune fille et Fraülein ; on a proposé une promenade au Bois… Mais, exécutée sans entrain, la petite réjouissance a échoué piteusement, et le temps se traîne lamentablement, entre le vieillard compassé et l’Allemande revêche, qui se