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Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/210

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— Eh bien, vous qui êtes si séduisante, si spirituelle… vous qui savez l’art de plaire, comme Raphaël celui de peindre, dites-moi : comment une femme s’y prend-elle pour garder sûrement un amoureux ?

— Oh ! petite amie… Qu’il est malaisé d’exprimer en peu de mots les mille problèmes que pose cette question unique ! J’ai cherché à résumer toute ma philosophie amoureuse par deux préceptes (que je n’eus jamais la force de suivre, d’ailleurs). Les voici : « Si tu es indifférente, feins une passion que tu n’éprouves point. Si tu aimes, dissimule soigneusement ton amour. » C’est là le secret de la puissance des coquettes ; celles qui parviennent à s’y plier deviennent irrésistibles… Par malheur, nous sommes, la plupart du temps, de pauvres petites bonnes femmes sans volonté dont la ruse, en amour, est beaucoup plus artificielle qu’artificieuse…

Sylvie m’écoute avec l’attention d’une enfant pieuse à sa leçon de catéchisme. Soudain, elle s’écrie joyeusement :

— Que vous êtes agréable à entendre ! Je n’ai jamais passé d’aussi bons moments… Vous permettez… J’ai envie de vous embrasser.