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Page:Marie Nizet - Le capitaine vampire.djvu/143

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guerre. Une audience lui fut aussitôt accordée et Mariora demanda à son mari la permission de l’accompagner. Tout en revêtant ses plus beaux atours, madame Isacesco se délectait à la seule pensée de pouvoir répéter à ses voisines ébahies : Le ministre nous a demandé… ; le ministre nous a répondu… ? etc., et, Baba Sophia ayant donné un dernier coup d’œil à la toilette de Mariora, les deux jeunes gens prirent le chemin de la ville.

Le souffle du printemps flottait dans l’air. Avril rougissait les bourgeons frileux qui se hasardaient timidement hors de leur enveloppe ; les cigognes et les hirondelles croisaient leur vol, et les violettes embaumaient l’herbe soyeuse où l’œil eût vainement cherché la plus humble des fleurs : la pâquerette blanche qui est peu commune en Roumanie.

Mariora et Ioan marchaient en silence à côté l’un de l’autre ; ils eussent craint de troubler par une parole la douce extase que cette matinée printanière versait à leur âme, quand soudain, la sentinelle avancée du renouveau lança, comme un cri de ronde, son joyeux « coucou ! »

Depuis l’aventure du bois de Baniassa, Mariora avait voué une haine implacable à l’oiseau-présage qui ne lui avait jamais annoncé que le malheur.

Isacesco ne partageait pas les préjugés de sa femme.

— Eh bien ! ibita mea, fit-il en la raillant doucement, que dit l’oiseau ?

— Il ne dit rien, répondit-elle le plus sérieusement du monde. Il ne se trouve ni à notre droite, ni à notre gauche ; il est là-bas, devant nous. Le vois-tu qui vole ?

— Et cela signifie ?…

— Rien, absolument rien. Ne ris pas, ajouta-t-elle, ce chant me rappelle de terribles instants et toujours cet