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Page:Marie Nizet - Le capitaine vampire.djvu/83

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compagnons, je reconnais la voix du garçon le plus niais et le plus riche de Bucharest.

— Comment ! c’est toi, Comanesco ! s’écria Iégor en jouant la surprise. On a poussé l’irrévérence jusqu’à te mettre en faction comme le premier plébéien venu ?

— Aô ! bailla le jeune Rélia d’un ton plaintif fort éloquent.

— Eh bien ! nous relevons la sentinelle, dit brièvement Liatoukine.

— Impossible ! je suis ici par ordre du colonel Leganesco.

Liatoukine ne voulait pas qu’on admit, du moins en sa présence, une autre autorité que la sienne ; l’observation de Rélia le choqua et il la classa dans un coin de sa mémoire.

— Et nous, nous te relevons par ordre de Leganesco, se hâta de dire Sokolitch.

— Ah ! tant mieux ! s’écria le jeune patricien avec une explosion de joie enfantine ; puis il reprit tout soucieux : — Où donc est celui qui me remplace !

— Ici ! dit Liatoukine en poussant par les épaules Ioury Levine qui fit une épouvantable grimace accompagnée d’un grognement sourd ; mais un regard du colonel lui ayant rappelé qu’on ne plaisantait pas plus avec les désirs du capitaine Vampire qu’avec la consigne la plus sévère, il commença à monter sa garde sans dire mot, tout en maudissant à part lui les ridicules fantaisies de son supérieur qui allaient lui valoir six heures de service surérogatoire.

Bogoumil et Iégor avaient pris chacun Comanesco par un bras, et ce dernier semblait bien soutenir qu’être soutenu ; Liatoukine marchait en tête : il avait l’air de conduire un troupeau ; Stenka formait l’arrière-garde,