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Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/393

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Lisette.

En quoi donc, madame ? Quelle finesse entendez-vous à ce que je dis ?

Silvia.

Moi, j’y entends finesse ! moi, je vous querelle pour lui ! j’ai bonne opinion de lui ! Vous me manquez de respect jusque-là ! Bonne opinion, juste ciel ! bonne opinion ! Que faut-il que je réponde à cela ? Qu’est-ce que cela veut dire ? À qui parlez-vous ? Qui est-ce qui est à l’abri de ce qui m’arrive ? Où en sommes-nous ?

Lisette.

Je n’en sais rien ; mais je ne reviendrai de longtemps de la surprise où vous me jetez.

Silvia.

Elle a des façons de parler qui me mettent hors de moi. Retirez-vous, vous m’êtes insupportable ; laissez-moi ; je prendrai d’autres mesures.



Scène VIII

SILVIA, seule.

Je frissonne encore de ce que je lui ai entendu dire. Avec quelle impudence les domestiques ne nous traitent-ils pas dans leur esprit ! Comme ces gens-là vous dégradent ! Je ne saurais m’en remettre ; je n’oserais songer aux termes dont elle s’est servie, ils me font toujours peur. Il s’agit d’un valet ! Ah ! l’étrange chose ! Écartons l’idée dont cette insolente est venue me noircir l’imagination. Voici Bourguignon, voilà cet objet en question pour lequel je m’emporte ; mais ce n’est pas sa faute, le pauvre garçon ! et je ne dois pas m’en prendre à lui.