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Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/65

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Arlequin.

Tenez, monsieur, je bois à merveille, je mange de même, je dors comme une marmotte ; voilà ma santé.

Lélio.

C’est une santé de crocheteur ; un honnête homme serait heureux de l’avoir.

Arlequin.

Cependant je me sens pesant et lourd ; j’ai une fainéantise dans les membres ; je bâille sans sujet ; je n’ai du courage qu’à mes repas ; tout me déplaît. Je ne vis pas, je traîne ; quand le jour est venu, je voudrais qu’il fût nuit ; quand il est nuit, je voudrais qu’il fût jour ; voilà ma maladie ; voilà comment je me porte bien et mal.

Lélio.

Je t’entends, c’est un peu d’ennui qui t’a pris ; cela se passera. As-tu sur toi ce livre qu’on m’a envoyé de Paris… ? Réponds donc !

Arlequin.

Monsieur, avec votre permission, que je passe de l’autre côté.

Lélio.

Que veux-tu donc ? Qu’est-ce que cette cérémonie ?

Arlequin.

C’est pour ne pas voir sur cet arbre deux petits oiseaux qui sont amoureux ; cela me tracasse. J’ai juré de ne plus faire l’amour ; mais quand je le vois faire, j’ai presque envie de manquer de parole à mon serment, cela me raccommode avec ces pestes