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Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/163

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particulière les épisodes dont il avait été le témoin ou les aventures intéressantes dans lesquelles il avait figuré. Je n’ai point oublié et n’oublierai jamais les quatre ou cinq jours que le général Lejeune a passés au milieu de nous à Versailles.


Une des femmes les plus à la mode et les plus aimées de nos salons de Versailles était, au début de la Restauration, Mme de Laporte. Son mari, ancien capitaine aux grenadiers à cheval de la garde impériale, était gros, grand, et… bon pour la garde ; il portait des moustaches démesurément longues, à la prussienne, et terminées par un petit balai de poils qui produisait le plus singulier effet du monde ; son nez d’un rouge violet était flanqué de deux gros yeux surpris, ouverts comme des portes de grange, et tout son ensemble le faisait ressembler, trait pour trait, à ces grotesques que les débitants de tabac placent sur le devant de leur boutique. M. de Laporte avait entendu répéter si souvent, lorsqu’il se promenait dans les rues de Versailles, coiffé de son bonnet à poil : « Ah ! le bel homme ! Quel magnifique officier ! » qu’il ne se trouvait jamais en face d’une glace sans s’admirer avec complaisance et avec cet air satisfait qui semblait indiquer que nul ne pouvait lui disputer la place sur aucun terrain. Cette suprême confiance en lui-même était heureuse pour la sécurité de la femme et du mari.

Mme de Laporte n’était ni une belle ni une jolie