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Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/228

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mens. Ce n’est pas ce petit imbécile qui… » Il ne pouvait rester en place et se mit à arpenter la chambre. Il se vit tout à coup en présence de Mme de Fontanin, et ses traits prirent une expression ferme et désabusée : « J’ai fait tout ce que j’ai pu, Madame. J’ai essayé la douceur, l’affection. Je lui ai laissé la plus grande liberté. Et voilà. Croyez-moi, Madame, il y a des natures contre lesquelles on ne peut rien. La société n’a qu’un moyen de s’en garantir, c’est en les empêchant de nuire. Ce n’est pas sans raison que les pénitenciers s’intitulent Œuvres de Préservation sociale… »

Un grignotement de rat lui fit tourner la tête. Sous la porte close un billet venait d’être glissé :

« Je te demande pardon pour pion. Je ne suis plus en colère. Laisse-moi revenir. »

Antoine sourit malgré lui. Il eut un brusque élan d’affection, et, sans réfléchir davantage, alla vers la porte et l’ouvrit. Jacques attendait, les bras ballants. Il était encore si énervé qu’il baissa la tête et pinça les lèvres pour ne pas éclater de rire. Antoine avait pris un air irrité, distant ; il revint s’asseoir.