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Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/30

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champs hersés, déjà verdissants, et, sous le ciel clair de l’horizon où s’étiraient de légères vapeurs, les coteaux de l’Oise étincelants de lumière. Il eût un instant la faiblesse de souhaiter s’être trompé ; tant de calme l’environnait, tant de pureté ! Était-ce là le cadre d’un bagne d’enfants ?

Il fallait traverser le village de Crouy en son entier avant d’arriver à la colonie pénitentiaire. Et tout-à-coup, au tournant des dernières maisons, il reçut un choc : sans l’avoir jamais vu, il reconnaissait de loin, isolé comme un cimetière neuf dans sa ceinture de murs crépis, au milieu d’une plaine crayeuse dénuée de toute végétation, le grand bâtiment couvert de tuiles, et ses rangées de fenêtres à barreaux, et son cadran qui luisait au soleil. On eût dit une prison, si l’inscription philanthropique gravée dans la pierre au-dessus du premier étage, ne se fut pas détachée en lettres d’or :

FONDATION OSCAR THIBAULT

Il s’engagea dans l’allée sans arbres qui menait au pénitencier. Les petites fenêtres regardaient de loin venir le visiteur. Il s’approcha du portail et tira la cloche qui tinta