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Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/60

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— « Comment veux-tu que j’aie de ses nouvelles », répondit-il, « on ne reçoit pas de lettres, ici. »

— « Mais toi », poursuivit Antoine, « tu ne lui écris pas ? »

Il tenait son frère sous son regard. L’autre eut le même sourire que tout à l’heure, lorsqu’Antoine avait parlé de poésie. Il haussa doucement les épaules :

— « C’est de la vieille histoire, tout ça… Ne m’en parle plus. »

Qu’entendait-il par là ? S’il eut répondu : « Non, je ne lui ai jamais écrit », Antoine l’eut brusqué, l’eut confondu ; et avec un secret plaisir, car la passivité de son frère commençait à l’agacer. Mais Jacques éludait la question, sur un ton ferme et triste qui paralysa Antoine. Au même moment, il crut remarquer que le regard de Jacques se fixait tout à coup derrière lui, du côté de la porte ; et, dans l’état d’animosité réflexe où il se trouvait, tous ses soupçons l’envahirent de nouveau. Cette porte était vitrée, afin sans doute que l’on pût surveiller du dehors ce qui se passait dans la chambre ; et, au-dessus de la porte, il y avait un judas grillagé sans carreau, qui permettait aussi