Page:Maupassant - Mont-Oriol, Ollendorff, 1905.djvu/271

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
265
mont-oriol

Andermatt répondit :

— Soyez tranquille. Je m’en charge. Je vais le sonder aujourd’hui même, sans vous compromettre et sans vous avancer ; et quand la situation sera bien nette, je parlerai.

— Parfait.

Puis, après quelques instants de silence, Gontran reprit :

— Tenez, c’est peut-être ma dernière journée de garçon. Je vais à Royat où j’ai aperçu l’autre jour quelques connaissances. Je rentrerai dans la nuit et j’irai frapper à votre porte, pour savoir.

Il fit seller son cheval et s’en alla par la montagne, humant le vent pur et léger, et galopant par moments pour sentir la rapide caresse de l’air effleurer la peau fraîche de ses joues et chatouiller ses moustaches.

La soirée à Royat fut gaie. Il y rencontra des amis que des filles accompagnaient. On soupa longtemps ; il revint fort tard. Tout le monde reposait dans l’hôtel du Mont-Oriol quand Gontran se mit à frapper à la porte d’Andermatt.

Personne ne répondit d’abord ; puis, comme les coups devenaient violents, une voix enrouée, une voix de dormeur, grommela de l’intérieur :

— Qui est là ?

— C’est moi, Gontran.

Attendez, j’ouvre.

— Andermatt apparut en chemise de nuit, la face bouffie, le poil du menton hérissé, la tête enveloppée d’un foulard. Puis, il se remit dans son lit, s’assit, et les mains étendues sur le drap :

— Eh bien, mon cher, ça ne va pas. Voici la situa-