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qui relient mes bains, mon hôtel et mon Casino. C’est bien simple. Je ne donnerais rien des autres, qui ne pourront se vendre que plus tard, par petits lots, à des particuliers…

Gontran répétait toujours :

— Diable… diable… en voilà une affaire embêtante… Alors vous me conseillez ?

— Je ne vous conseille rien. Je pense que vous ferez bien de réfléchir avant de vous décider entre les deux sœurs.

— Oui… oui… c’est juste… je réfléchirai… je vais dormir d’abord… ça porte conseil…

Il se levait ; Andermatt le retint :

— Pardon, mon cher, deux mots sur une autre chose. J’ai l’air de ne pas comprendre, mais je comprends très bien les allusions dont vous me piquez sans cesse, et je n’en veux plus.

Vous me reprochez d’être juif, c’est-à-dire de gagner de l’argent, d’être avare, d’être spéculateur à friser la filouterie. Or, mon cher, je passe ma vie à vous prêter cet argent que je gagne non sans peine, c’est-à-dire à vous le donner. Enfin, laissons ! Mais il y a un point que je n’admets pas ! Non, je ne suis point un avare ; la preuve c’est que je fais à votre sœur des cadeaux de vingt mille francs, que j’ai donné à votre père un Théodore Rousseau de dix mille francs dont il avait envie, que je vous ai offert, en venant ici, le cheval sur lequel vous avez été à Royat tantôt.

En quoi donc suis-je avare ? En ceci que je ne me laisse pas voler. Et nous sommes tous comme ça dans ma race, et nous avons raison, monsieur. Je veux vous le dire une fois pour toutes. On nous traite