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il est plus convenable que je la lui porte moi-même…

Gontran regardait son ami avec un sourire bizarre et gai qui semblait dire : « C’est très bien, tout cela, très bien ! Voilà comment les choses doivent finir, bruit, sans histoires, sans drames. »

Il proposa :

— Si tu veux, mon vieux Paul, nous irons ensemble après le déjeuner, quand elle sera levée, et tu lui feras part de ta détermination.

Leurs yeux se rencontrèrent, fixes, pleins de pensées inconnaissables, puis se détournèrent.

Et Paul répondit avec indifférence :

— Oui, volontiers, nous reparlerons de cela tout à l’heure.

Un domestique de l’hôtel entra pour prévenir que le docteur Black venait d’arriver chez la princesse ; et le marquis sortit aussitôt afin de le saisir au passage.

Il exposa au médecin la situation, l’embarras de son gendre et le désir de sa fille, et il l’emmena sans résistance.

Dès que le petit homme à grosse tête fut entré dans la chambre de Christiane :

— Papa, laisse-nous, dit-elle.

Et le marquis se retira. Alors, elle énuméra ses inquiétudes, ses terreurs, ses cauchemars, d’une voix basse et douce, comme si elle se fût confessée. Et le médecin l’écoutait comme un prêtre, la couvrant parfois de ses gros yeux ronds, prouvait son attention par un petit signe de tête, murmurant un : « C’est cela » qui semblait dire : « Je connais votre cas sur le bout du doigt et je vous guérirai quand je voudrai. »

Lorsqu’elle eut fini de parler, il se mit à son tour à