Aller au contenu

Page:Maurice Maeterlinck - L'intelligence des fleurs, 1922.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
223
LES DIEUX DE LA GUERRE

tibles, à côté desquels la vieille poudre noire, épouvante de nos pères, la grande foudre même, qui résumait pour nous le geste le plus tragique de la colère divine, semblent des bonnes femmes un peu bavardes, un peu promptes à la gifle, mais presque inoffensives et presque maternelles : personne n’a effleuré le plus superficiel de vos innombrables secrets, et le chimiste qui compose votre sommeil, aussi profondément que l’ingénieur ou l’artilleur qui vous réveille, ignore votre nature, votre origine, votre âme, les ressorts de vos élans incalculables et les lois éternelles auxquelles vous obéissez tout à coup. Êtes-vous la révolte des choses immémorialement prisonnières ? la transfiguration fulgurante de la mort, l’effroyable allégresse du néant qui tressaille, l’éruption de la haine ou l’excès de la joie ? Êtes-vous une forme de vie nouvelle et si ardente qu’elle consume en une seconde la patience de vingt siècles ? Êtes-vous un éclat de l’énigme des mondes qui trouve une fissure dans les