Aller au contenu

Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/233

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Elle m’écoutera, pensive et sans rien dire,
               Mais fixant sur moi ses grands yeux,
Avec tout ce qu’on peut mettre dans un sourire
               D’amour pur et religieux,

Et ses yeux me diront, éloquences muettes,
               Ce que disent à demi-voix
Les amants dont on voit les claires silhouettes
               Blanchir l’obscurité des bois.

Et sans bruit, pour que seul, oh ! seul, je puisse entendre
               L’ineffable vibration,
Jusqu’à moi son baiser descendra, grave et tendre
               Comme une bénédiction.

Et quand elle aura, pure, à ma coupable lèvre
               Donné le baisser baptismal,
Sans doute je pourrai guérir enfin ma fièvre
               Et t’expulser, regret du mal !

Oui, bien qu’autour de moi plane toujours et rôde
               L’épouvante de mon passé.
Que mon lit garde encor ta place toute chaude,
               Ô désir vainement chassé !