Aller au contenu

Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/170

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
162
LE ROI VIERGE

mais ils retombèrent lentement, avec un geste de mélancolie, n’ayant pas même embrassé des nuées.

Il remit la flûte à ses lèvres ; l’air doux, signal convenu peut-être, s’égrena de nouveau dans le silence du vent.

À l’une des notes une note répondit, lointaine, grêle, claire, — le son que pourrait avoir une bulle d’eau qui crève.

Il frémit, une pourpre soudaine aux joues, les yeux allumés de joie, et continua de jouer, s’arrêtant de minute en minute pour écouter le frêle écho, là-bas.

L’écho était le chant du Solitaire, mystérieux rossignol des alpes, que l’on entend quelquefois, que l’on ne voit jamais ; dans la blanche mélancolie de l’hiver, cette voix d’oiseau, répliquant à cette voix de flûte, semblait une réponse de l’idéal au rêve.

Le pâtre jouait toujours, plus vite, ravi, extasié ; le Solitaire, rapproché sans doute, et enflant son gosier dans quelque creux de roche, rivalisait d’un chant plus rapide avec les fusées de notes qui s’échappaient de la flûte ; ce n’étaient plus les plaintes vagues, éparses, qui pleuraient tout