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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/180

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LE ROI VIERGE

— Ma mère t’a menacé, toi, mon petit serviteur ?

— Moi, non, pas précisément. Mais, au moment où elle m’interrogeait, nous étions dans le jardin de la Résidence, au bord du lac ; le beau cygne qui a traîné plus d’une fois la barque où vous rêvez au clair de lune sous le casque d’argent des chevaliers du Saint Graal, est venu becqueter tout près de nous les gazons de la rive ; et la reine a considéré d’un tel air la précieuse bête blanche que je me suis mis à trembler ; évidemment, si je n’avais pas consenti à venir chercher Votre Majesté, le cygne aurait eu affaire non pas à Parcival, mais à votre cuisinier viennois, et j’aurais été exposé à manger, en sauce à la confiture de groseilles, une cuisse ou une aile de l’oiseau divin qui tire avec une chaîne d’or la nacelle de Lohengrin !

Le roi dit, après avoir songé :

— As-tu deviné ce que ma mère veut me dire ?

— Quelque chose de très désagréable évidemment, répondit Karl, puisque la reine arrive de Prusse, et puisqu’elle a fait mander, dès son arrivée, le prieur des Franciscains ; tout l’ennui qui nous peut venir des hommes passe par les