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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/234

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LE ROI VIERGE

Et, un mélancolique sourire aux lèvres sous la soie noire du masque, le capitaine désignait les belles herbes qui fleurissaient par touffes jusqu’aux yeux de Lisi ; car elle s’était bien gardée de les lâcher malgré le brouhaha de l’aventure.

— Mes fleurs !

— Offrez-les nous ; ce sera votre rançon.

— Oh ! je veux bien ! s’écria-t-elle. Et la pièce de six kreuzers, vous n’en voulez-pas ?

— Non.

— Ah ! mais, vous êtes de drôles de voleurs, savez-vous !

En pouffant de rire, elle jeta le gros paquet de fleurs à la tête du capitaine, qui fut tout enveloppé, des plumes de sa coiffe aux éperons de ses bottes, d’un éparpillement de pâquerettes, de bleuets et de boutons d’or accrochés aux passementeries de l’habit ; et, comme il se secouait en riant lui aussi, mais à peine, il eut l’air d’un joli arbuste remué du vent, qui laisse tomber ses fleurs et ses feuilles.

Ceci fut un signal de bonne humeur générale ; les villageois, s’apercevant que les choses prenaient une bonne tournure, et les bandits eux-mêmes, mis en gaieté par l’air moins triste de leur