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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/247

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FRÉDÉRICK

en être totalement affolé, et, à cause de la façon dont elle dansait le fandango, il lui avait fait donner, par la reine elle-même, le grand cordon de chanoinesse de l’ordre de Thérèse. Amoureuse et extravagante, elle extasia et stupéfia la morne Thuringe ; elle la ruina aussi, en se ruinant elle-même, car, plus tard, elle a pu dire : « Quand je suis arrivée à Nonnenbourg, j’avais cent mille francs, mais le roi me les a mangés ! » Enfin, à force de se faire donner des titres et des sommes, des châteaux et des palais, à force de jouer avec les ministres comme les enfants jouent avec des capucins de cartes, à force de cravacher les soldats et les bourgeois qui ne la saluaient pas assez vite, elle finit par avoir contre elle presque toute la cour et presque toute la ville. Aussi libérale que libertine, elle avait, il est vrai, chassé les jésuites et aboli la censure ; mais les Thuringiens ne lui surent aucun gré de cette ligne politique ; ce peuple ne voulait rien devoir à cette fille. Une chose mit le comble à l’irritation commune : Mona Kharis, que les étudiants à casquettes bleues, noires, vertes ou jaunes, chansonnaient volontiers en heurtant les cruches de bock-bier, s’avisa de fonder une confrérie d’étudiants à