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LE ROI VIERGE

souriante qu’elle aurait et de son joli cri effarouché, quand il apparaîtrait soudain.

Il tendit le cou, vivement, entre les lattes des roseaux.

Il demeura stupide, les prunelles élargies, la bouche béante.

Il regarda longtemps, sans haleine, s’accrochant aux roseaux pour ne pas tomber, avec l’air de quelqu’un qui contemple l’horreur d’un gouffre.

Puis, tout à coup, il s’enfuit, rapide, effaré, les bras en arrière, comme s’il avait voulu écarter la poursuite d’une vision. À travers champs, à travers bois, parmi les hautes herbes, entre les épines des broussailles, il s’élançait, les boucles rebroussées ! Dans l’emportement de cette course, il trébucha contre un quartier de roche. Il s’y laissa choir, harassé, et, la tête entre les mains, il se mit à sangloter longuement et douloureusement.

Ce qu’il avait vu, au lieu de la chère et pure Lisi, c’était une fille de village, grasse, suante et débraillée, et sa jupe de cotonnade en l’air, se livrant à un robuste garçon qui lui tenait les épaules entre ses grosses mains !