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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/281

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FRÉDÉRICK

et pour toile de fond les pentes des collines, un drame intitulé : le Jeu de la Passion.

Il y avait une fois — c’était dans des temps très anciens — un homme qui allait, pour de l’argent, faucher les herbes dans les prés et battre le blé dans les granges. Il avait nom Gaspar, ainsi que l’un des rois Mages, bien qu’il ne fleurât ni l’encens ni la myrrhe, et qu’il n’adorât d’autre étoile que la lanterne du cabaret. Une fois qu’il était saoûl de bière et de cidre, il s’en retournait d’Eschenlohe, où on l’avait loué pour la moisson, à Oberammergau où il avait sa femme et ses enfants. Soit que la bière eût été de mauvaise qualité, soit que le cidre eût été fait avec des pommes trop vertes, il se sentit fort incommodé durant le chemin, et en arrivant il trépassa, non sans faire d’assez laides grimaces. De cette mort rapide, et des grimaces aussi, on conclut qu’il avait pris la peste et qu’il l’avait apportée dans le village. De fait, quatre-vingt-cinq personnes, — cent neuf, affirment d’autres récits, — périrent misérablement en trente-cinq ou trente-sept journées, et ce qui mit le comble à l’épouvante, c’est que le capellan mourut lui-même, après avoir mangé l’hostie, comme