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Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/317

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FRÉDÉRICK

nom étaient engagés, venaient chanter les œuvres de Hans Hammer ; et lui, Frédérick, au fond d’une loge, seul dans toute la salle, — car, fréquemment, personne n’était admis à ces représentations dont le roi se réservait jalousement la joie, — il absorbait par tous ses sens, nerveusement et délicieusement affinés, l’ivresse miraculeuse des sons où planaient ses rêveries avec des ailes d’anges !

Une seule chose, — après quelques années de règne, — le détourna de sa passion unique ; la musique, dans son âme, faillit avoir une rivale. Ce fut quand il alla dans une cour étrangère, — l’étiquette royale l’exigeait, — pour assister aux fêtes d’inauguration d’une exposition universelle. Il vit la reine de cette cour, et demeura ébloui. Blonde et si blanche, — et souveraine d’un immense empire, — elle lui apparut comme un être vague, insaisissable, différente de toutes les femmes. Si elle avait été l’une de celles qui, par la familiarité du rang, permettent l’approche, autorisent l’espoir, il l’aurait à peine vue, ou se serait détourné d’elle avec dédain ; mais, même pour lui, roi, elle était si loin, si haut, qu’elle lui semblait idéale ; il pouvait la mêler à ses